j+105 : "croquer la vie à belles dents" et autres conneries
Si comme moi vous êtes déjà allés sur des sites de rencontres, vous aurez observé combien celles et ceux qui y sont inscrit(e)s abusent d'expressions toutes faites comme : "j'aime croquer la vie à pleines/belles dents" lorsqu'il s'agit de spécifier, dans la case "description", les traits essentiels de leur caractère. Certains aussi (les hommes beaucoup), dans les petites phrases qu'ils se choisissent pour synthétiser leur approche de la vie (je n'irai pas jusqu'à prononcer ou plutôt écrire le mot "philosophie"), choisissent : "vivre et laisser vivre". Ca, c'est pour la version positive de la présentation.
Pour faire court, ces célibataires-là n'arrivent pas à se caser ou à trouver "l'âme-soeur" (encore une autre expression qui me donne envie de tuer) parce qu'ils aiment la vie, ont des dents saines et sont "tolérants" (re-désir de meurtre). Encore qu'on puisse entendre aussi la dernière phrase du paragraphe précédent comme un slogan des anti-avortements lesquels, comme chacun sait, sont des gens hyper-tolérants...
Les sites de rencontres ne font que reproduire à l'identique la banalité ambiante dans un discours forcément stéréotypé puisque réductible aux cases qu'on doit cocher et au nombre de mots maximum auxquels on a droit pour se présenter.
Quant à la version négative, les plus honnêtes ou les plus sincères ne sont pas moins pitoyables. Car dans leur désir de se montrer sans fard, ils se présentent un peu comme : "je suis une merde, je ne suis pas un canon(e), je rate toutes mes relations amoureuses, ça 
fait 20 ans que je vis seul(e), je suis au bord de me tirer une balle. Est-ce que quelqu'un veut de moi ? J'y crois quand même malgré tout". Eux en général mettent bien leur photo la plus récente, sur laquelle on les voit, dans un sourire crispé-cadré de photomaton ou leur bermuda à carreaux au premier plan d'un cliché de vacances sur un fond de montagnes, contrairement aux belles dents qui en général mettent leur dernière photo de classe, ce qui les rajeunit d'un coup de 20 ans !
A part un prêtre pour les derniers sacrements, ou Lucifer pour un troc d'âme de dernière minute, il ne se trouve guère de clients pour répondre à une telle annonce, à part peut-être une autre âme-merde. Et là, on frémit à l'idée qu'ils se rencontrent et surtout se reproduisent, car la terre finira peuplée de petites merdes.
Je me suis interrogée sur cette expression galvaudée que déposent en général juste au-dessus de leur photo ces messieurs. Et comme je suis une véritable peste qui elle aussi n'échappe pas à certains stéréotypes, je me suis demandé si "vivre et laisser vivre" n'annonçait pas de potentielles ou de très réelles possibilités de cocufiages, comme un message subliminal envoyé à Mesdames les empêcheuses du niquer buissonnier, qu'il faudrait traduire par : "vivre (ma sexualité) et laisser vivre (ma bite et mes couilles)".
Autre spécificité, chez les belles dents : les centres d'intérêts. En général, ils aiment : la nature, les animaux, les enfants, voyager, aller au restaurant, écouter de la musique, aller au cinéma. Bref, en gros : ils aiment tout.
Là où j'ai su tout de suite que moi, je ne trouverais personne par ce biais, c'est que j'ai mis (à peu près) : "la nature m'emmerde, je déteste les animaux, les enfants me font chier quand ils n'ont pas une personnalité originale, je ne voyage jamais, j'aime aller au restaurant seule pour pouvoir observer les gens, j'écoute en boucle Led Zeppelin à fond les watts et je ne vais plus au cinéma". Je n'ai pas dit cela par pur esprit de contradiction, mais simplement parce que je n'ai plus toute la belle dentition de mon enfance je suppose. Et puis que, si j'avais dit la vérité ("j'aime le bizarre, le tordu et les méandres intellectuels") je sais bien que 99,9 % de crétins auraient compris que je voulais une relation en cuir et en bottes ou que j'étais une mateuse en quête d'enculeurs de pigeons pour pouvoir jouir.
Ce qui, je vous le dis en toute franchise, n'est pas du tout le cas. Encore que (pour être tout à fait honnête) si vous connaissez des enculeurs de pigeons, présentez-les moi afin que je les mette sur mon balcon pour pouvoir enfin me débarrasser de cette engeance roucoulante et laide et chieuse qui me réveille tous les matins à 6 heures !
Moi, dans la dernière présentation que j'avais mise sur Meetic, j'avais tenu à préciser, afin de gagner du temps, que les coprophages, les racistes, les homophobes et les gens de droite passent leur chemin. Enfin en résumé et d'une manière bien tournée. Eh bien les "modérateurs" (c'est le nouvel euphémisme politiquement correct pour ne pas dire le mot "censeurs") ont suprimé : "les gens de droite".
Moi, je sais bien que jamais je ne pourrai fonder une relation amoureuse avec quelqu'un qui ne partage pas mes valeurs politiques, qui sont des valeurs humaines avant tout. Il n'y a pas à tortiller là-dessus. Sur Meetic, on a le droit de dire qu'on ne veut pas de gros si l'on est un fétichiste de la minceur, d'athées si l'on est catho pratiquant, de femmes si l'on préfère les hommes, d'hommes si l'on préfère les femmes, de spécifier qu'on préfère un juif ou un musulman, un breton un corse ou un basque, mais on n'a pas le droit de dire qu'on ne veut pas d'un mec de droite (je n'ai pas testé le résultat si j'avais mis "de gauche" afin de voir si la censure était l'expression d'un choix politique...).
Bien sûr j'ai officiellement protesté puis me suis retirée du site après cette censure. Bien entendu, ils m'ont répondu par une lettre aussi stéréotypée que les cases qu'ils font remplir et n'ont répondu à aucun des singuliers arguments que j'y avais développés.
Bref. Un jour, je vous raconterai certaines de mes aventures après des rencontres que j'ai faites par ce biais.
En attendant, si certains des lecteurs de ce blog utilisent les expressions "croquer la vie à belles/pleines dents" ou "vivre et laisser vivre", je vous promets que je leur envoie une kyrielle de mots piégés qui leur éclataront à la gueule !
Qu'on se le dise : je suis une édentée adepte de la pillule abortive qui ira rôtir en enfer car elle est une synthèse des créatures de Jérôme Bosch !
Sur ce, je vous bécote et je vous laisse avec ça (la chanson vaut mieux que la courte intro parlée), au titre pas du tout stéréotypé : "les pantoufles à papa":