J+66 : 20 kilos de plomb – 10 kilos de plumes = 10 kilos de plomb (et pas 10 kilos de plumes)

Publié le par jeveuxunamoureux

poids-copie-2.jpgHier matin, à 11 heures, j’ai monté la colline, l’estomac lesté de 20 kilos de plomb, pour aller porter un petit carton vert et un petit carton jaune tout remplis de mon écriture, glissés dans une enveloppe orange griffée de son nom, dans le bar où je l’ai vu deux fois.

 

Peut-être l’y retrouvera-t-on dans 15 ans, toute poudreuse, bistrée de gras, derrière quelque bouteille de jus au texte évaporé, tout comme le contenu qui n’aura jamais été bu ou lu par son destinataire.

 

eg8pj43r.jpgJ’en suis redescendue l’estomac lesté de 10 kilos de plumes. Vous ne m’aurez pas là-dessus, et je sais très exactement que le plomb et la plume sont équivalents en poids, qu’une histoire ait du plomb dans l’aile ou qu’elle ait un poids plume.

 

Comme je redescendais, une chose étrange s’est produite. Alors qu’un lent travail d’effacement de l’intégralité de son visage avait commencé à faire son œuvre depuis ce dimanche, j’ai tout à coup, juste après avoir déposé mes mots colorés, pu reconstituer son visage dans sa totalité.

 

Ce phénomène de disparition, je l’ai compris comme un travail préparatoire de l’inconscient amoureux, qui dissout préventivement les traces de nos futurs chagrins, comme un criminel détruit les preuves d’un crime pour ne pas se faire prendre. La reconstitution mémorielle ne fonctionne bien que dans l’espoir. L’espoir envolé, il ne lui reste plus un seul pixel photographique à moudre.

 

autres-manifestations-berthen-france-1101792054-1193006.jpgJ’ai reçu hier un coup de fil de mes copines. Elles s’inquiètent et c’est bon signe : cela veut dire que j’ai d’excellentes copines. Mais je les ai rassurées. Je suis un cheval de trait qui avance dans la vie d’un pas sûr et constant, en dépit des cailloux, des ornières, de la gadoue, de la mauvaise terre dans laquelle le sabot s’enfonce, et des divers obstacles qui lui barrent le chemin. Après tout, mon mal et son remède sont bien connus. Mais je crois que si elles s’inquiètent, c’est moins en raison de la souffrance – notre lot commun – qui pourrait m’affecter, et partant les affecter par rebond, que parce qu’elles me savent excessive, immensément démesurée, en un mot : russe ! C'est-à-dire prête à toutes les ignominies pour vivre cette passion jusqu’au bout. Et là, je ne peux que les rejoindre.

 

plombs10.jpgAu-delà de cela, ce qui me navre surtout c’est le nombrilisme amoureux dont je fais preuve ces derniers temps. Il n’y a rien de plus dégoûtant et d’égocentrique que la passion qui fait déballer ses tripes, ses boyaux, ses entrailles ; que cet égout de sentiments qui ne s’intéresse qu’aux histoires de plomberie et de robinet qui coule, cette vieille tuyauterie du cœur qui craque de partout. Et puis parler de soi si l’on n’est pas prix de Nobel de littérature ou échotier d’un quelconque Nous Deux, devient vite lassant à la longue. Au mieux, vaudrait-il résumer tout ça par un long soupir. Car l’état de souffrance amoureuse est essentiellement répétitif, plaintif, dépressif, laudatif et tout un cortège de mots qui finissent en « IF ».

 

A part ça, le boxeur invisible ne me quitte quasiment plus, ne me laissant respirer que pour mieux me boxer, ce qui arrive à me maintenir dans une sorte de vie végétative artificielle, comme une comateuse.

 

Sur ce, je vous laisse sur une ‘tite chanson qui est un état d’âne parfaitement coordonné. Et je prie très obligeamment Cupidon de bien vouloir guider les pas de mon amour de plume jusqu’à la lettre déposée au Repos, afin que je puisse retrouver le mien et délester mon cœur du plomb qui l’alourdit.

 

 

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M
<br /> Boire le poison jusqu'à la lie.........sse<br /> <br /> Tu lui prêtes beaucoup de courage.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> A lui ? Pour quoi ? Pour me faire face ? Affronter ma propre détermination ? Affronter ses sentiments ? What ? What ? What ? Joli le lie.... sse...<br /> <br /> <br /> <br />